Covid-19 : essoufflée, l’Egypte change de stratégie contre le virus

Article : Covid-19 : essoufflée, l’Egypte change de stratégie contre le virus
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19 janvier 2021

Covid-19 : essoufflée, l’Egypte change de stratégie contre le virus

Ailleurs comme en Egypte, la Covid-19 fait bien parler d’elle en ce début de nouvelle année. Entre recrudescence de nouveaux cas et défaillance du système sanitaire, le pays des pharaons retient son souffle. La pression et l’inquiétude grandissent et poussent le gouvernement Sissi à resserrer la vis.


La pandémie flambe en Egypte avec des chiffres alarmants : ils sont passés de moins de 200 cas en octobre 2020 à 1400 cas par jours en janvier 2021.  Ces indicateurs risquent de conduire le pays à un confinement total selon la ministre de la santé, Hala Zayed.  

De son côté, le premier ministre égyptien, Mostafa Madbouly tape du poing sur la table. Visiblement, il en a assez de l’indiscipline et de l’irresponsabilité des uns et des autres face au coronavirus. Malgré sa dernière sortie du 23 décembre 2020, les mesures de lutte contre la pandémie peinent à être respectées. Résultat : le port du masque et certaines mesures sanitaires deviennent une priorité ; et ce, sous un contrôle policier rigoureux.

Une amende pour motiver au port du masque

Au Caire, plus précisément dans des quartiers populaires, une image inédite attire l’attention depuis le 1er janvier : tous les riverains munis d’un masque. C’est une preuve que le port du masque est désormais obligatoire et très surveillé. Et mieux, tous les réfractaires courent une peine pécuniaire de 50 livres égyptiennes (soit 12 euros ou 1500 francs CFA). « On s’en foutait avant des masques. Mais maintenant, c’est très sérieux. Personnellement, je préfère mettre le masque que de payer une somme que je peine déjà à gagner », confie Lofty.

Comme l’explique ce quinquagénaire, l’insouciance vis-à-vis du masque d’il y a quelques mois, est en train de disparaître. Habitant de Maadi, l’un des quartiers les plus boycotteurs du masque, il loue malgré-lui, la nouvelle stratégie du gouvernement. « Sans cette amende, je vous jure que les gens ici, ne mettront jamais le masque. Voilà que la maladie ne cesse de progresser. Et si le masque peut aider, alors le premier ministre a bien fait de trouver ce moyen de nous l’imposer », a-t-il reconnu.

Cette forme de discipline impromptue, n’est pas vaine. Hormis l’amende en vigueur, la pression policière aussi vient jouer un rôle déterminant.

Patrouille inopinée de la police

La police est plus que jamais aux aguets. Elle est omniprésente à l’entrée des rues. Et l’ultime objectif est de traquer tout citoyen sans masque. Sur l’axe routier Maadi-Ramsès, menant en plein centre de la capitale, le contrôle policier est rude. Pour ce trajet d’environ trente minutes, on peut subir au minimum deux inspections policières inopinées. A chaque arrêt, ce sont les désobéissants comme Brahem, qui font les frais. Pour ce jeune homme, la peine va être double ce jour. En plus de son amende, il est contraint de descendre de l’autobus. « Le bus va continuer sans vous. Vous devez aller vous procurer un masque obligatoirement avant de remonter dans n’importe quel autre moyen de transport. On ne peut pas vous laisser continuer le trajet sans masque », lance un policier à l’endroit du groupe des sanctionnés.

Si cette explication du policier convainc, elle est jugée trop sévère pour Issa, qui se retrouve encore à 7 kilomètres de sa destination finale. Il dit sa consternation : « On est punit et je n’ai rien contre ça. Mais trouver un autre bus à partir d’ici pour Rames, c’est trop compliqué et c’est une grosse perte de temps pour nous. On me prend mes 50 livres et en plus on m’annule le déplacement que j’ai déjà payé ».

La police ne se limite pas qu’aux contrôles routiers. Elle fait régulièrement des descentes fortuites dans les quartiers. Dans la localité de Maadi, les patrouilles portent depuis peu, leurs fruits. La discipline et la prudence retrouvent leur place au sein de la communauté. Il est même fréquent d’assister à une mise en garde entre résidants. Au-delà, d’une simple forme d’entraide, rappeler le port du masque à un proche est un geste salutaire selon Lofty. « J’interpelle les jeunes dans la rue ici, pas forcément parce qu’ils risquent de payer une amende. Mais parce que la situation dans les hôpitaux est grave : autant porter le masque que de se retrouver dans un hôpital et mourir par faute d’équipements sanitaires », prévient-il d’un ton inflexible.  

Le port du masque ne compense pas le manque d’équipement dans les hôpitaux

Le port du masque ne peut pas prendre sur son dos, l’échec de tout un système sanitaire. Du moins c’est ce que pensent certains égyptiens. Les plus loquaces, indexent plutôt le manque crucial d’équipements dans les hôpitaux. « Il n’y a même pas le nécessaire pour permettre aux soignants d’exercer et de sauver des vies », déplore Y.S [pseudonyme], un médecin de Charqiya, au nord du pays. Pour étayer ses propos, Y.S évoque la mort de quatre patients Covid-19, à l’hôpital d’Al-Husseiniya, faute d’oxygène. « Ce jour là, il n’y avait même pas une petite bouteille d’oxygène dans toute la région de Charqiya.» Il rajoute : Et les soignants ont regardé ces quatre patients mourir. Si cela arrivait ici dans mon hôpital, je ne pourrais rien faire aussi sans oxygène », se remémore-t-il.

Cependant, cet évènement macabre relayé le 02 janvier 2021 par un blogueur, a d’une part exacerbé la colère de plus d’un. Et d’autre part c’est la politique sanitaire, qui a amorcé de nouvelles directives. D’abord, différents groupes de discussions sur le réseau social Facebook, ont ouvert la brèche aux critiques. Plusieurs internautes y consacrent du temps et de l’humour  pour dénoncer une mauvaise gestion du coronavirus. « Mais on espère que les cinquantes livres récoltées auprès de ceux qui ne mettent pas le masque, aideront à équiper les hôpitaux de réservoirs d’oxygène », peut-on lire sur une page Facebook.

Cette tribune virtuelle est ensuite renforcée par la voix de plusieurs associations des droits de l’Homme, qui suggèrent pour la plupart, une protection du personnel soignant. Finalement, en ligne de mire, le gouvernement de son côté, tente désormais de redorer son blason. Via son ministère de la santé, il renforce la campagne de sensibilisation sur la pandémie. Et parallèlement, il donne carte blanche à son département de sécurité pour faire respecter le port du masque et autres mesures barrières en vigueur.

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Commentaires

DAGA K. MARC F.
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L'information en tout impartialité. Je vous suis depuis le Bénin. Il faut vraiment prendre des précautions.

OmonJames
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Merci cher Marc